Frédéric Roux

Assez !

Incipit & more

Rien ne sera plus comme avant !
(truisme)
Non, tout est pire…
(constatation de bon sens)

Mai 68, au même titre que la résistance ou la guerre d’Algérie, est un trou noir dans la conscience historique française.
On ne doit s’y référer qu’en tenant les discours convenus qui s’y tenaient déjà l’époque.
Pour avoir avancé, à ce propos, quelques hypothèses iconoclastes, l’auteur a été licencié du Nouvel Observateur et provoqué la publication du plus épais «Courrier des lecteurs» de l’histoire de cet hebdomadaire où il fut traité, entre autres, de : « nazillon », « vomisseur d’excréments », « trou du cul Doc Marten’s » et quelques autres joyeusetés de coloration stalinienne, avant, pour couronner le tout, d’être dénoncé comme « révisionniste » par Martin Karmitz dans Télérama.
Pour aller plus avant dans son analyse, Frédéric Roux a écrit cet essai qui est aussi un pamphlet (à moins que ce ne soit l’inverse).
Ce livre est divisé en deux parties : Hier (ce qui s’est vraiment passé) et Aujourd’hui (ce qui se passe réellement). Chacune de ces parties comporte quatre chapitres : « De Mai 68 et des prétendues libérations ultérieures », « Des générations », « De la trahison », « Du situationnisme en général et de Guy Debord en particulier » pour la première partie ; « De l’abandon de l’explication de texte et des quelques inconvénients qui en sont découlés », « Du travail », « De la dépression et de son expression », « De la soi-disant disparition du prolétariat » pour la deuxième.
La thèse de l’auteur est assez simple : Mai 68 n’a pas été tout ce que l’on en a dit jusqu’à présent, il n’y a pas eu révolution politique ou culturelle dans le sens couramment admis ni même de trahison ultérieure, mais, en revanche, Mai 68 marque l’adoption des nouvelles normes qui régissent, à l’heure actuelle encore, nos existences avec toute l’humanité qu’on leur connaît.
68 (en France, mais aussi à l’étranger) a marqué : la fin des oppositions de classes traditionnelles ; la modernisation du capitalisme qui en avait bien besoin et de l’oppression qui n’en demandait pas tant ; le succès éphémère (en même temps que la défaite définitive) de la classe moyenne ; le changement d’état du social qui, de solide est devenu gazeux ; la victoire de la technique et de sa police.
Tout ce dont nous souffrons aujourd’hui (analphabétisme voulu, misère sexuelle, confusion sciemment entretenue) était clairement lisible (pour qui savait lire) dans l’Utopie foirée d’hier par la petite-bourgeoisie montante.
À ne pas vouloir regarder cet échec dans les yeux, on se condamne à le revivre perpétuellement. C’est tout ce que l’auteur ne désire pas.

Ce livre m’avait été commandé en 1997 par François Bourin alors qu’il était directeur littéraire chez Flammarion.
    Il a été ensuite refusé par Raphaël Sorin, qui a pris sa suite, puis, successivement, par les éditions : Le Rocher, Mille et une nuits, Albin Michel, José Corti, Grasset, Galilée (le jour de son envoi), Julliard, La Découverte, Verticales, Liber-Raisons d’agir, Payot & Rivages, Ramsay, Les Belles Lettres, l’Âge d’homme, La Table ronde (qui a égaré le manuscrit entre-temps), Exils, Les Empêcheurs de penser en rond, Actes-Sud, Gallimard, Zulma (deux ans après que je leur ai envoyé), Le Cherche-midi éditeur, Méréal.
    Les éditions Ivrea, l’Insomniaque, Distance, l’Esprit frappeur, Sulliver, Michalon, Laurence Mauguin et Climats n’ont pas jugé bon de me répondre.
    Les éditions Allia l’auraient bien publié amputé du chapitre sur Guy Debord.
    Ainsi va l’édition en France…